Le lac Tritriva
Si je devais ne visiter qu’un lieu à Madagascar, ce serait le lac Tritriva. Son nom est resté dans ma mémoire aussi loin que je me rappelle. Ne me demandez pas pourquoi, je ne le sais pas, mais j’y pense très souvent depuis toujours. Pourtant, je n’en ai pas vraiment de souvenir visuel, c’est plutôt un sentiment étrange que je ressens à chaque fois, entre le malaise et le vide. Vous savez, cette impression qu’on a quand il nous manque quelque chose mais qu’on arrive pas a savoir quoi. Mais toujours avec cette impression pressante que je dois y aller.
A 15 kilomètres d’Antsirabe, perché à 1881 mètres, le lac Tritriva rempli le cratère d’un volcan éteint, sa profondeur de 160m lui donne une couleur sombre faisant penser qu’il protège quelques mystères en son fond, entretenant ainsi de nombreuses histoires et légendes. Beaucoup de similitudes avec le lac Pavin en Auvergne sur les rives duquel j’aime beaucoup me promener.
Le Tritriva avant le reboisement !!!
Depuis mon enfance, le lieu à changé. Reboisé par les habitants désirant le rendre plus accueillant, c’est aujourd’hui havre de paix, dont la falaise abrite deux couples de rapaces, entouré d’arbres dans lesquels nichent des cardinaux, des huppes et autres oiseaux, la flore n’étant pas en reste. Rien à voir avec ce qu’il était il y a encore quarante ans. Le Tritriva était un lac mort. Pas un brin de vie, ni animale ni végétale dans et autour du lac.
Vérités ou légendes, explicables ou pas, les guides et enfants que l’on rencontre dès le parking sont intarissables quand ils parlent du lac, enjolivant ou inventant certaines histoires pour donner encore plus d’intérêt à leur discours. La plus populaire étant certainement celle de Rabeniomby et Ravolahanta,
Les amoureux du Tritriva
les amoureux du Tritriva, Roméo et Juliette malgaches que leur amour interdit poussa à se jeter dans les eaux profondes avant de se réincarner en deux arbres enlacés surplombant le lac, saignant si on les écorchait selon la légende. Une histoire probablement représentée sur cette illustration et qui a moins de sens depuis le reboisement.
Je sais, c’est moins poétique, mais comme j’aime à chercher le rationnel à l’origine des légendes. Les particularités physiques du lac qui elles, me semblent réelles (certaines le sont) accentuent son côté mystérieux, mais expliquent en grande partie les fady (interdits) et les légendes s’y rapportant. Ainsi, ses eaux sont chargées en soufre (et en gaz carbonique selon certains guides). Caractéristique empêchant toute vie dans le lac (il n’y a pas un poisson), justifiant sans doute le fady interdisant de s’y baigner et cette légende d’un chinois ayant voulu traverser le lac et ayant coulé au milieu tout comme ce Vazaha, Louis Victor, ayant voulu vérifier si les arbres saignaient vraiment.
De même, il semblerai que que le lac communique avec celui d’Andraikiba et un autre lac situés à quelques kilomètres, ce qui expliquerai peut-être que son niveau augmente à quand les autres baissent à la saison sêche, et qu’il baisse à la saison des pluies quand les autres montent. Je me rappelle des phrases de mon père, expliquant pour accréditer cette thèse, que du colorant avait été mis dans un des lac et qu’il était ressorti dans l’autre. Si ce colorant était rouge, celà expliquerait l’origine des arbres qui saignent et de cette autre légende selon laquelle lorsqu’un événement grave va se produire à Madagascar, le lac devient rouge … L’âme de Madagascar dont, autre particularité, il a d’ailleurs la forme.
Mais laissons la tradition orale si chère à notre regrété tonton Lucien se propager, s’enrichir de nouvelles histoires, vraies, probables ou totalement inventées. C’est ce qui fait la richesse d’une culture, et faisons confiance aux anciens et à leur sagesse qui en est souvent à l’origine.
Il existe de nombreuses autres histoires sur le lac Tritriva, toutes plus intéressantes et captivantes que les autres, mais je vous laisse le plaisir de les découvrir lors de votre visite, à déguster sans modération sur place et à emporter dans votre valise à souvenirs.